" Sans moi tu te noierais dans un verre d'eau "

Après le long hiver qui avait vu le tragique décès de Dennis, mais aussi la rupture avec De André, la verdure reprenait ses droits. La neige et le froid disparaissaient enfin, ironiquement quelques jours seulement après le gel du pauvre Dennis. Pour la famille Renoir, désormais, la vie se résumait à regarder le temps passer, à attendre la mort sans y penser. Notre veuve noire, en effet avait envie d'une pause. Son histoire avec De André l'avait fortement marquée et elle y pensait souvent. Et puis, en vieillissant de jours, elle s'était bien rendue compte qu'elle n'était pas immortelle et qu'il faudrait accrocher au cintre sa tenue de veuve noire.

Pourtant, Patience ne s'ennuyait pas  malgré le fait qu'elle ne cherchait plus à zigouiller de potentiels époux. Elle avait plus de temps pour bichonner le potager, qui s'était mis à bourgeonner dès que le soleil avait commençé à poindre. Elle passait une bonne demi-journée à entretenir avec amour ces plantes, comme jamais elle ne l'avait fait avec un de ses mari. D'ailleurs, son potager faisait partie des choses qu'elle tenait le plus au monde . 

Le temps passait et les membres de la famille vieillissaient. Harold avait pris un sacré coup de vieux. Il est devenu sauvage, un peu ours, en fait. Mais toujours célibataire. Avoir eu un fils à un âge aussi jeune et surtout avec un extraterrestre, l'avait probablement traumatisé de toute tentative d'intimité sensuelle avec un être intelligent. Lui passait ses journées dans la brousse à chercher des animaux rares et à les vendre. Il s'était fixé comme but d'avoir une belle décapotable rouge au sièges capitonnés simili-léopard.  

Bref, la vie suivait son cours, jusqu'à ce qu'une surprise de taille vint à se présenter à la maison familiale. C'était De André. Mais pour quelle raison est-il revenu après la grande dispute qu'il avait fait quitter ce foyer ? Avait-il oublié un de ses sous-vêtements ou bien sa brosse à dent ? Ou alors, son retour avait une signification bien plus profonde ? Patience y vit une opportunité. Un retour en piste incroyable. Si elle arrive à récupérer De André, malgré ce qu'il sait, selon elle, c'est considérer que plus rien ne peut l'arrêter. Et puis, elle avait une vengeance personnelle à lui faire subir. Si peu d'hommes ont su résister à son charme... 

" De André ? Que fais-tu donc là ? Si tu as quelque chose à me dire, au moins rentre et ne reste pas sous la pluie ! "

Alors il entra à la maison. La toile que tissait Patience se refermait sur lui. De André s'expliqua : Depuis son départ, il n'avait cessé de penser à elle, quelques fois amoureusement, d'autres fois la peur au ventre. Il voyait encore toutes ces urnes qui contenaient les restes de ses anciens époux, il savait Patience dangereuse. Mais le défi l'intéressait et puis, depuis quand De André tremble devant une simple femme ? Impossible ! Alors, il se laissa tenter...

" Et oseras-tu relever le plus grand des défis de ta vie ? Annonça Patience en faisant apparaitre une bague de fiançailles d'on ne sait où. Ou bien vas-tu fuir ?

- De André n'a peur de rien, poupée ! Et de toi, moins que d'autres choses ! "

 Et en moins de temps qu'il faut pour dire "incroyable retournement de situation", ils s'étaient réconciliés au lit, comme Ulysse et Circée en d'autres temps. Patience jouait les amoureuses transies. Il s'agissait de ne pas réveiller la méfiance de De André, si elle voulait se venger de lui convenablement. 

Le mariage tarda un peu, mais De André, finalement convaincu de l'amour que lui portait Patience, se laissa mettre la bague au doigt. 

Elle faisait semblant de se laisser émouvoir par ses talents de musicien. Elle feignait des sourires attendris chaque fois qu'elle le croisait. Elle joua la comédie quelques jours et jugea qu'il était temps de se remettre en chasse et de trouver l'amant qui brisera son cœur.  

C'est en se rendant au salon de stylisme que Patience trouva le candidat idéal : 

" Oh mais j'y crois pas ! Murmura Patience entre ses dents. Vous avez vous cette vieille qui fricote avec ce jeunot ! Intolérable ! C'est à MOI de faire ça ! Place ! Bonjour jeune homme !

- Bonjour madame.

- Vous vous appelez ?

- Justin Kaynes, madame. Que puis-je pour vous ?

- Oh, mais tant jeune homme, tant ! Mais d'abord regardons des photos de moi jeune. Olala ! Mais voyez comme j'étais une déesse ! On n'en voit plus des comme ça !

- Oh et là, c'est qui ?

- C'est mon petit-fils, mais cela n'a aucune importance ! Parlons encore de moi !

- Je suis un peu pressé en fait !

-  Il faudra absolument qu'on se revoit ! J'ai tant de choses à vous montrer ! Au revoir ! Fait elle en ajoutant un geste d'adieu. Puis s'adressant à elle-même, elle ajouta : Bon, ma Patience si tu veux te venger comme il faut le faire bien ! Profitons d'être au salon de beauté pour s'offrir un relooking ! "

" Allez, quittons cette robe de mémé et montrons à la face du monde qui est la seule et vraie veuve noire ! Hmmm... il faut des gants de dentelles...

 - Génial ! Il faudra mettre une plaque d'immatriculation VEU VE NO IRE sur ta voiture, histoire d'être encore plus discrète... Je dit ça, car j'ai peur que les autorités policière finissent par te retrouver !

- Qu'ils me retrouvent ! Et qu'est-ce qu'ils pourront bien faire de plus à une vieille femme outragée par le temps comme moi ! Qu'ils m'arrêtent, ce ne sera pas trop tôt ! Je n'ai pas peur d'eux ! Mais en attendant... j'ai des hommes dans la nature qui attendent d'être séduits... "

Alors commença, l'étape de la cour pour Patience et Justin. C'est comme redécouvrir l'amour et sentiments à nouveau à chaque fois, ou bien pour Patience jouer le jeu bien rôdé de la séduction. Bien entendu, avec les bons côtés, comme les mauvais. 

" On pourrait pas plutôt le faire sous la douche ? "

Maintenant il fallait que De André découvre le pot-aux-rose. Une fois son petit cœur brisé en mille morceaux, viendra la part difficile : se débarrasser de lui. Non pas que c'est une tâche difficile, parce que Patience tient à lui, mais c'est une tâche difficile car elle n'a plus trop d'idées originales pour le tuer facilement. Veuve Noire Mag(c), sa première source d'inspiration ne propose qu'élucubrations et idées impossibles. Attendre qu'une météorite l'écrase, inconcevable ! On dirait que notre chère vieille Patience devra recycler ses vieilles recettes !

Quoi qu'il en soit, avant d'enterrer De André, Patience invita Justin à la maison. A peine l'eu-t-elle salué que De André déboula dans le salon. Il faut dire que monsieur était jaloux comme un zèbre. 

" NAN, MAIS C'EST PAS VRAI ? Je te pardonne, je t'accorde ma confiance, on s'épouse, je fait même des efforts pour draguer moins souvent la gent féminine... ET TU ME FAIT UN COUP PAREIL ?

- Oh. On dirait que mon cher mari est rentré. Il faut que je te présente Justin !

- Ouais, c'est ça ! Dégage de suite mec. Il faut que je parle à ma... femme. Et si tu veux un bon conseil, ne la fréquente pas, elle est dangereuse ! 

- Eh bien De André ? Le tableau ne te plait pas ? Et pourtant, qu'ais-je fait que tu n'as pas fait subir à cent autres de mes congénères ? Le renvoi d'ascenseur est un peu violent, hein ?

- Qu'est-ce que tu crois, que ça va se passer comme tu le veux ? Que ton petit jeu va continuer indéfiniment ? Je vois clair dedans et crois moi... je ferais tout pour que cela s'arrête !

- Eh bien ! Ce n'est qu'une vengeance De André, croyais-tu vraiment que je puisse tomber comme cela dans le piège de l'amour ? Après tant d'année ? Les machos comme toi, c'est les dodos, c'est condamné à disparaitre ! "

YIIIIIIHAAAAAAAAAAAAAAA !!!

On pardonnera la tentative de réplique épique de Patience qui a probablement échoué sur une plage, loin d'ici... mais business is business... il faut désormais en finir avec De André. De toute manière il en savait trop : 

" Qu'est ce que tu me veux Patience ? J'ai bien voulu te voir ici, sur ce sécuritaire terrain vide à l'abri des regards, parce que je sais que je ne risque rien ! Car, OUI. Je suis persuadé que tu es mêlé de près aux décès de tout ces époux, peut-être même d'autres disparitions, comme à Appaloosa Plains il y a quelques années... Et c'est pour cela que je vais aller dire à la police tout ce que je sais !

- Ah, c'est parfait ! Tu n'as pas encore prévenu la police ! J'ai l'esprit un peu plus serein ! Et si tu allais donc faire un tour dans cette piscine ?

- Très bien et qu'est-ce que tu vas me faire ? Tu va essayer de me noyer à la force de tes bras de vieille femme ?

- Mais non ! Mon cher époux, c'est la fatigue qui va te tuer !

- Et tu crois vraiment que je vais rester là dedans jusqu'au moment où je serais à bout de force ? Tu m'a pris pour un de mes ancêtres débiles, incapables de sortir d'une piscine sans échelle ?

- Hmmm, disons que je reçois l'aide de forces supérieures ! Barbotte bien, je récupérerais ta tombe demain !

- C'est ça, comme si je devais avoir peur d'une piscine !

- Mon pauvre, je l'ai toujours pensé de toute manière : Sans moi tu te noierais dans un verre d'eau  !"

Bien plus tard : 

" NOOOOOOOOON ! BRBLRBLRLBRLBRLBRLLBLBL... "

" BONJOUR ! AAAH ZUT ! MA FAUX EST COINCE DANS CE STUPIDE GRILLAGE ! ET EN PLUS IL N'Y A PAS A AME QUI VIVE ICI ! PERSONNE POUR M'ACCEUILLIR ! DECIDEMMENT, IL N'Y A PLUS DE RESPECT POUR LES SERVICES GRATUIT ET PUBLICS ! "

Au petit matin, Patience se réveilla en compagnie d'une veille rencontre :

" Ah ! Benjamin? Je me douterais que je te trouverais ce matin ! Je sais tu fais la tronche. Oui, De André est mort noyé, comme toi ! Oui, tu pensais qu'en tant que premier de mes époux, tu aurais le droit à plus de considération ! Oui, tu n'aimes pas l'idée d'être maintenant un noyé parmi tant d'autres... OUI les fantômes vont peut-être te confondre avec lui ! Mais mets-toi un peu à ma place ! Je n'avais pas une idée correcte pour me débarrasser lui ! Tu n'as qu'à prendre ça comme un hommage ! Oui, voilà comme un hommage ! Maintenant fiche le camp, il faut que je m'habille pour aller chercher sa tombe ! OUI, tu m'a déjà vue nue, mais pas à cet âge ! Puis le coup du seul regard accusateur, bof ! Je sais très bien que tu peux parler ! Allez file, ectoplasme encombrant ! "

En parlant d'encombrement ectoplasmique, au vu du nombre de maris décédés qui sont entassés sur la table basse derrière la cheminée, on a mis la tombe de De André, ailleurs. A l'arrière de la maison. Si Patience continue comme ça à engranger des morts, on ne saura plus ou les mettre. Peut-être que Duncan et Kepler accepterons de sacrifier un peu leur espace personnel pour des urnes dans leurs chambres ? Quoi ? Patience a une chambre énorme ? Oui, mais elle sert et sera beaucoup moins utile si des urnes de maris décédés se mettaient à l'envahir. Sinon dans la même optique on cache juste les cadavres sous le lit ?

Avant de se jeter dans les bras d'un énième prince charmant, Patience avait pris l'habitude de consacrer un peu de temps à sa famille. Quoi de mieux de profiter de l'anniversaire de Kepler pour s'organiser une belle sortie familiale ?

" Qu'est-ce qui est prévu grand-mère, pour mon anniversaire ?

- Allez je me jette à l'eau ! Au programme, les enfants : pour être dans le thème du moment on va à la piscine. Ensuite on va souffler les bougies de Kepler au petit restaurant à côté de la plage ! Petit gâteau en intimité près de la baie !

- La piscine, excellent m'man ! Par contre pourquoi on n'a pas pris ma nouvelle voiture ? Je me sentirais encore plus en sécurité !

- Mais je peux encore conduire ! Faites moi confiance, je ne vais pas vous tuer ! C'est dommage qu'il grêle par contre...

- Mais il ne grêle pas maman !

- Alors je devrais changer de lunettes... "

Après la trempette, ou bizarrement personne ne se noya ou se retrouva coincé dans la piscine, la petite famille se retrouva pour souffler les bougies de Kepler : 

Bon anniversaire Kepler ! En devenant Ado, il a gagné le trait Rebelle. On ne va pas parler génétique et compagnie, il ressemble surtout à un alien, glabre et verdâtre. Il a tout pour séduire les lycéennes, ce garçon !

" Hey ! C'est censé être une fête familiale ici ! Et je peux certifier que vous n'êtes pas de ma famille ou de mon cousinage ! Alors, laissez moi une part de gâteau ! "

" Mais c'est pas possible ?! C'est aussi le rassemblement annuel des dégénérés de Twinbrook ? "

" HAROLD ? Je sais que tu passes beaucoup de temps dans la nature à pourchasser des animaux. C'est toi qui a invité cette BICHE ? "

" C'est n'importe quoi cette fête ! La vieille, elle se casse ! Et en plus j'ai pas eu de gâteau ! Moi ! La propre grand-mère ! "

Pour finir avec cette histoire d'anniversaire, on peux définitivement dire que Kepler a surtout pris le côté extraterrestre des gènes qu'il a reçu et qu'il semble définitivement perdu pour l'humanité ! 

A SUIVRE !

Comments

[Bettyboopjade]

Bon sang ce que j'ai ri !

Impayable cette veuve ! ^^

Retard rattrapé !

[Goby03]

RIP De Andre. Mais je trouve qu'il l'a bien mérité. Il est trop stupide et puis on ne contrarie pas une veuve noire.

[ptitemu]

Toujours aussi drôle ! Pauvre De Andre, même pas une place pour sa tombe auprès des autres victimes... En même temps lui il est particulièrement bête, il savait à quoi s'attendre...